Il était une fois, dans un village niché au pied d’une grande montagne, un jeune artisan nommé Émile. Émile rêvait de devenir le meilleur fabricant d’horloges de la région. Il avait des mains habiles, des idées brillantes, et un désir ardent de voir ses créations admirer les murs des maisons les plus nobles.
Mais Émile avait un compagnon particulier. Un ouvrier invisible logeait dans son esprit : son propre cerveau.
Cet ouvrier, parfois obéissant, devenait d’une efficacité remarquable. Chaque matin, Émile se réveillait plein d’élan et d’idées nouvelles. Son esprit le guidait, lui murmurait comment tailler les engrenages, ajuster les ressorts, et polir le cuivre avec une précision incroyable. Dans ces moments, Émile se sentait invincible, comme si rien ne pouvait l’empêcher d’avancer. C’était les jours où son cerveau était son employé le plus dévoué.
Mais certains soirs, lorsque le travail devenait dur ou que les échecs s’accumulaient, l’ouvrier invisible changeait d’attitude. Elle s’assombrissait, critiquait Émile, lui répétait sans cesse qu’il n’était pas assez bon, que ses rêves étaient trop grands, ses mains trop maladroites. Et au lieu de l’aider à bâtir, ce cerveau sabotait, démolissait, et ralentissait tout. Émile perdait confiance, laissait son atelier se remplir de poussière, et ses rêves s’étiolaient.
Un jour, un vieux sage du village entra dans l’atelier silencieux. Il observa Émile, l’esprit sombre, assis face à une montre inachevée.
— Pourquoi as-tu cessé de travailler ? demanda-t-il.
— Mon esprit m’a convaincu que je n’y arriverai jamais, murmura Émile.
Le sage sourit.
— Ton cerveau peut être le plus fidèle des employés, mais il peut aussi devenir ton saboteur. La clé, c’est de ne jamais le laisser travailler seul. Tu dois être son chef. Donne-lui des ordres, dirige-le. Si tu le laisses choisir la tâche et l’heure, il risque d’ouvrir des portes inutiles ou de te mener en arrière.
Émile comprit alors que l’ouvrier invisible n’était ni bon ni mauvais : il ne faisait que suivre son propre élan. S’il n’était pas dirigé, il s’égarait. Si on lui donnait une vision claire, il bâtissait des merveilles.
Dès ce jour, Émile commença ses journées en donnant des instructions à son cerveau, comme un chef à son employé : une seule tâche à la fois, une direction claire, et surtout, de la gratitude pour le travail accompli.
Petit à petit, son atelier reprit vie, les horloges tic-taquaient d’espoir, et son nom devint célèbre dans toute la vallée.
Moralité :
Ton cerveau travaille toujours — mais c’est à toi de décider s’il construit tes rêves ou les détruit. Sois le chef, pas l’ouvrier.
